La cave à thé idéale – 2
Cave à Puerh
Le thé Puerh (ou pu-erh, ou pu'er) est un thé à part en ce qu'il est le seul vrai thé fermenté et qu'il gagne à passer par un processus de maturation dans de bonnes conditions. Il en existe deux sortes principales, le cru et le cuit que l'on trouve sous 2 formes : soit en vrac, soit compressé sous des formes diverses qui vont de la galette au champignon en passant par le meulon et le tuocha. (cf. Types de thés)
Cave à Puerh – (8 images)
Dans sa forme originale, c'est un thé de terroir, qui prend généralement le nom de la montagne ou du village dans lequel il est cueilli. Dans un premier temps, lorsqu'on se constitue une cave de pu-erh, la stratégie consiste à acheter de petites quantités, voire d'échantillons, de thés d'origines différentes. Dans un second temps, on pourra acquérir une trentaine de galettes (pour une personne) pour les mener à maturité, et en fonction de sa consommation en racheter 2 ou 3 par an pour maintenir sa cave à flot. Un exemple avec ma petite réserve de Puerh.
C'est donc un thé de garde pour lequel il faudra prévoir une « cave », c'est-à-dire un endroit adapté à son vieillissement et un meuble idoine, type étagère à tiroir et quelques paniers ou malles en osier, bambou, carton… cf. Vieillissement du Puerh. Plus d'infos sur le vieillissement du Puerh dans ce résumé d'un très bon article en anglais.
Surtout si l'on vit dans un appartement calfeutré en hiver, les taux d'humidité peuvent facilement descendre en dessous de 50% d'humilité relative, ce qui a tendance dessécher le pu-erh de façon alarmante. Il faudra donc prévoir un système d'humidification même rudimentaire comme des bacs remplis d'eau sur les radiateurs, ainsi qu'un spray d'eau journalier, indirect (donc, pas sur les galettes elles-mêmes, elles risqueraient de pourrir). Cela peu sembler anecdotique, mais personnellement j'ai remarqué une différence notable dans l'évolution de mes pu-erh depuis que j'humidifie l'atmosphère et les malles en osier où ils se trouvent.
Il faut savoir que la plupart des informations écrites sur les emballages de Puerh (en plus d'être en chinois) et celles données par les boutiques en ligne sont souvent fantaisistes, voire mensongères, et que le côté artisanal d'une production n'est pas toujours synonyme de qualité (encore moins d'hygiène). Pour acheter des Puerh de qualité il faut donc soit :
- connaître un vendeur fiable
- être un expert et pouvoir goûter des échantillons
- écouter le bouche à oreille et les conseils des blogs d’amateurs éclairés…
- et surtout ne pas chercher à acheter de vieux pu-erh sur Internet (+ de 15 ans) car à part le fait que vous les paieriez une fortune, y'a 90% de chances que ce soit des faux.
L'âge d'un Puerh n'est absolument pas un critère de qualité ! |
Critères de qualité d’un Puerh
- type de théier et de culture (cultivar, transitif, plantation, semi-sauvage…)
- âge des théiers (- de 20 ans, + de 100 ans, + de 500 ans…)
- terroir (nom du village AOC, sol, altitude, climat…)
- type et date de cueillette (cueillette impériale ou grossière, printemps, automne…)
- type de traitement (séchage au soleil ou au wok, pressage manuel ou machine, mélange de feuilles d'origines diverses ou d'origine unique, voire d'arbre unique…)
- qualité du traitement (qualité du trie, hygiène, odeurs de fumée…)
- durée et qualité du stockage (humide ou sec, lieu, âge…)
Bien qu'aucun de ces critères n'est en soi qualifiant ou disqualifiant, personnellement je recherche surtout :
- Puerh AOC de Yiwu, Lao Ban Zhan, Lincang…
- origine unique venant de théiers semi-sauvages ou sauvages de + de 100 ans
- cueillette de printemps ou d'automne (les 2 ont leurs charmes)
- séché au soleil et pressé manuellement (ou du moins peu compressé)
- et surtout vieillis en séchage naturel sec…
Personnellement je fuis le séchage humide, les pires expériences de thé de ma vie ! Pour accélérer le vieillissement, certains margoulins du Puerh, ont cru bon de littéralement asperger d'eau les précieuses galettes, et de créer une atmosphère artificielle, humide et chaude. Ce qui a pour principal effet de donner un goût de serpillière moisie au thé…Ceci étant, les Hongkongais ont développé une technique de séchage « semi-humide » alternée et contrôlée qui donne des résultats intéressants, mais toujours en dessous du séchage naturel. Qui plus est, vu le peu de fiabilité des informations fournies par les producteurs et les vendeurs, on ne saurait que trop conseiller la dégustation d'échantillons avant tout achat ! 2 critères simples que même un amateur comme moi peut percevoir :
- persistance en gorge (Hou Yun) franche et durable
- nombre d'infusions important (une dizaine pour 5gr en gaiwan)
Si le Puerh ne présente pas ces 2 caractéristiques il ne s'agit probablement pas de « vrais théiers anciens » du Yunnan, et il y a peu de chance que des arômes tertiaires se développent en vieillissant. Concernant le goût, c'est plus complexe : les jeunes Puerh peuvent présenter une certaine amertume si on les infuse normalement, et parfois des thés semi-agés semblent un peu « éteints ». Pour tempérer l'amertume des jeunes Puerh, on peut bien sûr baisser la température de l'eau ou faire des infusions « éclairs » (on compte jusqu'à 5). Mais on peut aussi après 2 ou 3 infusions laisser « murrir » le thé 24h dans la théière, ça adoucira ses ardeurs… La seule chose qui soit vraiment rédhibitoire, c'est les gouts parasites désagréables de : fumée, moisi, chimie…
Ci-dessous un petit schéma à agrandir sur les différents types de théiers du Yunnan et le processus de fabrication des 2 principaux Puerh.
生茶 shēng chá, Pu'er cru
熟茶 shú chá, Pu'er cuit
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