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Les types de thés et leur procédé de fabrication

La notion de variété de thé est relativement récente, puisque pendant des siécles on a bu le thé produit où importé dans sa région (essentiellement du thé vert en Chine et au Japon). Généralement un type de thé correspond à un besoin précis lié à la conservation ou au transport : Brique de Puerh apte à supporter les rudes conditions climatiques des caravanes. Thé noir fabriqué spécialement pour l'exportation afin de ne pas moisir pendant le long transport en cale humide (6 à 8 mois) d'un bateau à voiles. On raconte que les Anglais « inventèrent » le Earl Grey (thé masqué de bergamote) pour cacher le goût de moisi d'un arrivage…

Le thé dans sa forme la plus simple est la feuille du théier que l'on cueille fraiche sur l'arbre pour l'infuser… Mais tout le monde n'a pas un théier dans son jardin et malheureusement la feuille de thé se décompose rapidement. Un simple séchage au soleil sur des nattes, durant 1 à 2 jours, brassé et retourné régulièrement pour assurer un séchage uniforme, suivi d'un bref chauffage au feu. C'est un façonnage qui est à l'avantage d'être simple à réaliser, mais qui demande des conditions climatiques idéales.
Thé séché au soleil   (4 images)

Bien que tous les thés proviennent à l'origine du même type de plante (le Camelia Sinensis); et que techniquement on puisse faire du thé vert ou noir avec n'importe quelle récolte, de fait, un type de thé commence bien avant son façonnage. Le choix de cultivar, le terroir, le climat et la date et le type de cueillette vont déjà lui donner une grande partie de son caractère. Aussi, bien qu'il y ait autant de procédés de fabrication que de thés et que certains soient jalousement gardés, on peut les regrouper en 5 familles principales de thé :

  • Blanc
  • Vert
  • Oolong
  • Noir
  • Puerh

Thés blancs

Yin ZengLes blancs sont les thés les moins travaillés, avec seulement 2 opérations : un flétrissage à l'air libre et une dessiccation. Leur spécificité vient aussi du type de cueillette : bourgeons duveteux de printemps pour le Yin Zhen. Le thé blanc est une spécialité chinoise du Fujian, les imitations du Darjeeling ne sont pas encore au niveau…

Thés verts

Thé vertPour ce type de thé, les feuilles passent par 4 opérations : Le séchage primaire, la torréfaction, le roulage et la dessiccation.

Séchage primaire
Les feuilles sont simplement laissées à l'air libre, étalées sur des claies, pour quelques heures.

Flétrissage
Le flétrissage fait perdre aux feuilles par évaporation 25 à 50% de leur poids et neutralise les enzymes responsables de la fermentation, empêchant ainsi la décomposition de la feuille. En « passant » les feuilles dans une sorte de grand wok (ou à la vapeur ; méthode japonaise), tout en brassant les feuilles en continu, pendant une durée variable de 30s à 5 minutes. Les feuilles deviennent aussi plus malléables pour le roulage.

Roulage
Les feuilles sont roulées ou pliées à la main pour leur donner une forme idoine.

Dessiccation
Les feuilles sont aérées sur des séchoirs à claies pendant quelques minutes puis laisser au repos une demi-heure autant de fois que nécessaire, jusqu'à ce qu'elles ne contiennent plus que 5 à 6% d'eau.

À part la torréfaction qui est faite à la vapeur, le processus de fabrication des thés verts japonais est sensiblement le même en plus mécanisé. Les différences de goût proviennent surtout des cultivars, du terroir et des méthodes de culture.
> Tableau récapitulatif des thés japonais

Thés Wulong

Les Wulong (ou Oolong) sont des thés semi-oxydés. Il en existe 2 types principaux :
Tie Guan YinOxydation légére (10%-15%) : type Tie Guan Yin
Wu-Yi Dan-CongOxydation poussée (60%-70%) : Type Da Hong Pao

Les feuilles cueillies recoivent le même traitement que le thé vert, avec une étape supplémentaire avant la torréfaction, la « sudation » :  dans un local à 23- 25°C et à fort taux d'humidité (+85%), les feuilles sont brassées avec vigueur pour évaporation de l'eau. C'est de la durée de cette étape dont dépendra leur niveau d'oxydation. Suivront donc, la torréfaction pour stopper la réaction enzymatique et le roulage pour donner la forme à la feuille. Les meilleurs Wulongs sont originaires du Fujian en Chine et de Taiwan.
Un peu le cul entre 2 chaises, le Bao Zhong (ou Pouchong) particulièrement délicat et aux feuilles remarquables, se situerait entre un thé vert et un Wulong à oxydation légère.

Thés noirs

KeemunCe sont des thés souvent grossiers que l'on produit en grande quantité pour les sachets ou les thés aromatisés et que l'on revend aux enchères à la tonne pour faire les blends (mélanges) divers… Mais il existe aussi quelques grands crus chinois ou du Darjeeling qui confirment la règle. Il y a 2 procédés principaux pour produire du thé noir :

  • Procédé orthodoxe, c'est celui qui est utilisé pour les thés noirs de qualité.
  • Procédé CTC, mis au point dans les années 30 en Assam dans un souci de productivité, c'est le procédé industriel le plus utilisé.

Le procédé orthodoxe
Le procédé orthodoxe est assez proche de celui d'un Wulong dont on prolongerait l'oxydation à 100% et dont la fabrication serait entièrement mécanisée en 5 étapes :

Flétrissage (6 à 24h)
Permet l'évaporation d'une grande partie de l'humidité des feuilles cueillies.

Roulage (30 à 60mn)
Dans ce cas précis, il a pour rôle non pas le façonnage des feuilles, mais celui de provoquer l'oxydation enzymatique en brisant les cellules des feuilles. Selon l'intensité de ce roulage, les feuilles donneront un thé plus ou moins corsé.

Oxydation (1à 2h)
Les feuilles sont mises à reposer en couches de 4 à 6 cm, dans des pièces à 90-95% d'humidité et à température constante (20 à 25°C). Le temps que s'opère la transformation de leurs enzymes en théaflavines et théarubigines qui donneront la couleur et l'astringence au thé infusé.

Dessiccation
Elle stoppera cette oxydation en portant brièvement le thé à température élevée (85-90°C) et stabilisera la feuille à un taux d'humidité de 2 à 3 % (plus humide elle moisirait, moins humide elle deviendrait insoluble dans l'eau…).

Tamisage
Pour trier les feuilles par taille et qualité (entières, brisées, poussières…)

Le procédé CTC (Crushing, Tearing, Curling)
Broyage, déchiquetage, bouclage en français : On ne fait pas dans la dentelle… ! Après un flétrissage léger, les feuilles sont d'abord coupées puis complètement déchiquetées entre des cylindres métalliques munis de lames, et enfin roulées, dans une sorte de grand tonneau roulant sur lui-même (Ghoogi).
Schéma de fonctionnement d'une usine à thé CTC

Déchiquetage
Déchiquetage à la tronçonneuse – Le retour !
(7 images)
Ce type de récolte et de traitement donne un thé puissant, mais monogoût et plat, avec peu d'arômes et ayant perdu ses polyphénols… parfait donc pour les mélanges artificiellement parfumés !

Les grades
Les Darjeeling sont classés et vendus par grade et qualité de feuille, en fonction du type de cueillette et de façonnage. Classement assez subjectif et variable d'un jardin à l'autre, et confus pour le consommateur. Même si en Occident on ne trouve que les qualités supérieures, les Fannings et Dust étant réservés au marché indien ou à la fabrication de sachets.
En régle générale, plus les feuilles sont entières plus le thé est cher, sans pour cela présumer d'une qualité gustative supérieure. Généralement les grands crus sont cueillis et traités en FOP, mais tous les FOP ne sont pas des grands crus. Comme toujours, le meilleur moyen pour juger un thé, c'est de la goûter !
Essayons tout de même de comprendre les grandes lignes de ce foutoir indien… Pour la petite histoire, « Orange » viendrait du nom de la dynastie néerlandaise Oranje Nassau. Et « Pekoe », du chinois Pak-ho, signifiant « duvet blanc » (comme la jeune pousse enroulée sur elle même).

  • FOP (Flowery Orange Pekoe) : Feuilles entières provenant de la cueillette impériale.
  • BOP (Broken Orange Pekoe) : Feuilles brisées provenant de cueillette fine.
  • OF (Orange Fannings) : Brisure provenant de cueillettes grossières.
  • D (Dust) : Poussière provenant de résidus divers

Golden étant la couleur des jeunes pousses de début de saison devenues dorées avec la fermentation et Tippy signifie qu'elles sont en grande proportion dans le thé. Fine et Super Fine précisent leur finesse :

  • SFTG : Super Fine Tippy Golden
  • FTG : Fine Tippy Golden
  • TG : Tippy Golden

FTGFOPLe grade supérieur étant donc le SFTGFOP (Super Fine Tippy Golden Flowery Orange Pekoe) mais même là, les feuilles sont loin d'être entières et d'avoir la qualité de façonnage d'un grand thé chinois. Quant à la brisure et à la poussière de thé, il y a plus de brisures et de poussière que de thé et il vaut mieux donc oublier… Elles serviront à fabriquer les sachets bas de gamme des supermarchés ou les sodas au thé glacé…

> Suite (Puerh & Co)